La vie : édito de Monseigneur Jaeger – Eglise d’Arras n°02

Monseigneur Jaeger, évêque d'Arras

Depuis quelques jours, a été lancée une concertation nationale sur un certain nombre de questions qui touchent à la vie. Cette démarche, dans l’intention du pouvoir politique, prélude à la révision des lois relatives à la bioéthique. Cette procédure sera accompagnée ou suivie d’un passage devant le parlement d’un projet de loi sur la procréation médicalement assistée étendue aux couples composés de deux femmes.

Tout porte à croire qu’au-delà de l’exposé des arguments et de la volonté sincère de dialogue, les débats étaleront au grand jour les fractures qui traversent la société française sur les manières de comprendre l’être humain, la vie, la nature. Nous savons qu’il n’y a plus de consensus en ces domaines qui touchent à l’identité personnelle et aux relations entre les individus. 

Que nous dit l’enseignement de l’Eglise ? Il préconise le respect intégral et la promotion de la vie de la conception jusqu’à la mort naturelle. Il faut ajouter que la conception est alors comprise comme la rencontre d’un homme et d’une femme dans le mariage. Ils se donnent l’un à l’autre dans l’amour. Ils en appellent la fécondité dans la transmission de la vie. Ainsi, nous dit notre foi, l’homme et la femme sont associés à l’œuvre créatrice de Dieu lui-même. Même si l’Eglise n’abandonne pas celles et ceux qui peinent sur ce chemin, c’est bien celui-ci qu’elle invite à tracer.

Dans notre société occidentale, peu de membres de la famille humaine ont la conviction forte d’être en quelque sorte, dans le jeu de la vie, les collaborateurs de Dieu. Animés du désir, presque sans limites, de décider en toutes choses pour eux-mêmes et par eux-mêmes, ils récusent l’idée d’une transmission de la vie qui serait un don généreux et gratuit.

Munis, de surcroît, d’une multitude de possibilités scientifiques et techniques, nos contemporains font facilement main basse sur la vie, l’instrumentalisant au profit de la satisfaction de leurs attentes et de leurs désirs. La vie, la nôtre et celle d’autrui, devient un accessoire utilisé par chacun pour contribuer à son mieux-être, celui-ci étant bien sûr déterminé par lui-même. La loi qui veille au bien commun n’a plus qu’à s’adapter. Pourquoi mettrait-elle des limites au désir puisqu’il a toutes les possibilités de se réaliser ?

Force est  de reconnaître qu’au fil des années, l’évolution de l’opinion s’écarte d’une approche chrétienne de la vie. Nous savons depuis longtemps que les cultures et leurs orientations ne puisent plus à la source de l’Evangile la lumière qu’elles ne cherchent plus qu’en elles-mêmes.

Les profondeurs de l’être humain ne sont pas affaire de sondages. L’Eglise n’ignore pas qu’elle n’imposera pas de gré ou de force le message qu’elle porte sur la vie. Elle doit aujourd’hui entrer dans un débat qui se fait témoignage. Il est toujours nécessaire d’enseigner et d’expliquer, mais l’attestation et le discours ne suffisent plus.

Les catholiques doivent avoir l’audace de montrer personnellement et en communauté tous les trésors, les richesses et les fruits d’une vie pétrie de l’Evangile, accueillie et transmise comme un don toujours merveilleux qui s’étiole et meurt s’il est enfermé dans un funeste principe : je veux et puisque je peux, je fais.

En cette année 2018, nos propos et nos engagements seront certainement souvent et opportunément sollicités. Dans les semaines et les mois qui viennent, il nous faudra aller plus loin que ces premières considérations. Les conséquences des décisions qui seront prises impacteront la vie des personnes, des couples, des enfants. Elles marqueront les relations sociales et l’art de vivre ensemble. Le travail, la formation, la réflexion, les prises de parole, la prière ne peuvent pas manquer le rendez-vous.  

+ Jean-Paul Jaeger

Article original sur arras.catholique.fr